En France les zones humides ont longtemps été considérées
comme des zones à drainer pour gagner en surface exploitable mais
aussi pour lutter contre la malaria autrefois répandue dans notre
pays. Ce qui apparaissait alors comme une nécessité à l’époque,
apporte aujourd’hui son lot d’inconvénients. Á commencer par une
perte de biodiversité (faune et flore) mais ce n’est pas tout !
Les écologues nous expliquent que cette diminution de la surface
des zones humides est préjudiciable car ces zones humides possèdent
au moins deux intérêts majeurs:
- Elles jouent un rôle « tampon » fondamental en
retenant les excès d’eau lors des pluies intenses qu’elles sont
ensuite capables de restituer lors de périodes plus sèches. Ainsi
elles régulent efficacement les débits des cours d’eau. Et c’est
gratuit ! Nul besoin d’aménagements coûteux.
- Elles forment de véritables puits de carbone,
notamment dans les zones de montagne où la température moyenne sur
l’année est basse. En effet la matière organique synthétisée par
les plantes en absorbant du dioxyde de carbone présent dans l’air
et l’eau du sol, a du mal à se dégrader dans ces milieux. Les acides
humiques qui s’accumulent acidifient le milieu et les tanins finissent
par y bloquer l’activité microbienne, si bien que cette matière
organique, partiellement dégradée, s’accumule. Le dioxyde de carbone
absorbé pendant la vie de la plante est en quelques sortes mis en
conserve. C’est gratuit aussi !
Le climat change du fait de l’augmentation du dioxyde
de carbone atmosphérique. Une des conséquences est que les phénomènes
météorologiques avec des pluies intenses alternant avec de longues
périodes sèches deviennent de plus en plus fréquents. Les zones
humides permettent donc de lutter à la fois contre la cause et la
conséquence.
Comment comprendre qu’on puisse vouloir aujourd’hui
construire 10,7 km d’autoroute en sacrifiant 20 hectares de zones
humides ?
Malgré les mesures de compensation exigées et qui
consistent à créer des zones humides artificielles de remplacement,
le préjudice causé à l’environnement est considérable. Nos enfants
ne risquent-ils pas d’en faire les frais ? D’autant plus que le
maitre d’ouvrage possède maintenant l’autorisation pour commencer
les travaux avant que les terrains destinés aux mesures de compensation
soient achetés. Ces mesures seront-elles vraiment respectées jusqu’au
bout sachant qu’elles augmentent considérablement le coût total
du projet ?
Ce projet de déviation à 2×2 voies de la RN88 va
dans le sens d’une augmentation du transport routier, grand producteur
de dioxyde de carbone responsable en partie du dérèglement climatique.
Le développement des infrastructures routières rend les déplacements
automobiles avantageux par rapport à d’autres moyens de transport
et il conduit à encore plus de voitures sur les routes. Ce qui entraine
très vite une forme de saturation de ces infrastructures et donc
la nécessité de les développer encore. Ne s’agit-il pas ici d’un
véritable cercle vicieux ? Ne serait- ce pas dans ce piège que nous
sombrons avec ce projet alors qu’il est urgent, sans utopie mais
par nécessité, de revoir nos modes de déplacement y compris dans
les campagnes ?
La déviation à 2×2 voies apparait donc comme un
non sens à l’heure de la transition écologique. Le 6 mai 2020 le
Conseil National de Protection de la Nature avait d’ailleurs donné
un avis défavorable. Est-il encore opportun de se lancer dans des
projets autoroutiers d’une telle ampleur ? Si la recette a fait
ses preuves par le passé, est-ce bien encore aujourd’hui la meilleure
manière de dépenser l’argent du contribuable de la région AURA ?
Les travaux s’étaleront sur de nombreuses années
car le chantier est colossal. De nombreux problèmes techniques ne
manqueront pas de surgir du fait de la géologie locale et des fortes
pentes comme ils sont apparus lors du contournement du Puy avec
leur lot de surcoûts. La couche d’argile située dans le sous sol
des environs du Pertuis et de Saint-Hostien, héritée d’une époque
reculée antérieure à celle du volcanisme, risque bel et bien de
faire exploser le budget. La Région AURA, principal financeur, est-elle
prête à aller jusqu’au bout quoiqu’il en coûte ? 23 ans après la
déclaration d’utilité publique du projet, est-ce qu’il le reste
encore aujourd’hui ?
Nathalie et Francis Collet , habitants du Pertuis
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